Friday, September 29, 2017

Ironman Zurich 2017

Je m´étais inscrit à Zurich dans l´éventualité d´une non qualification pour Hawaii (finale mondiale d´Ironman). La course dite plan B. Mais je me suis qualifié dès la fin mai.
Zurich est donc devenu une grosse-grosse session d´entrainement et l´occasion de faire une épreuve réputée pour le paysage du parcours vélo et son atmosphère en course à pieds.
Sans la pression de la qualification, la préparation – pendant les vacances – fut dilettante ! Avec quelques problèmes logistiques (annulations de vols) qui ont réduit les sorties vélo en nombre et en durée. J´arrivais à Zurich sans avoir nagé depuis 1 mois (sauf 500m la veille), sans avoir fait une sortie au-dessus de 30km/h depuis 1 mois. Il n´y a qu´en course à pieds où ça allait. Mais je craignais ne pas pouvoir bien courir à cause d´un vélo trop faible.

Passage chez nos amis (ex-brésiliens) Emilie & Sam sur la route de Zurich

J´avais donné des temps estimatifs à Guerlain pour qu´il puisse suivre : 53mn en natation, car sans combinaison pour moi, 5h30 en vélo (comme lors mon 1er IM en 2008), et une fourchette entre 3h30 (idem Floripa J) et 4h00 (si je mangeais mes dents) au marathon.
Le résultat confirme, s´il y avait encore un doute, qu´il faut VRAIMENT traiter la distance Ironman avec respect !
-        55mn en natation, qui correspondent aux 53mn car il y avait 150m extra – ça va.
-        5h37 en vélo, proche du pronostic – ça va même si ce n´est pas terrible.
-        Et un énorme – par la durée – 4h17 au marathon. C´est nul.
-        11h19 au total, mon pire Ironman.

-        Et pourtant, je suis satisfait de ma course – allez comprendre !

Avec Guerlain
Avec Eric



Parfaite météo, 17 à 28 deg prévus, on va se régaler. Guerlain m´accompagne vers le départ. Les sas sont encore vides. C´est un « rolling start », c´est à dire que 8 athlètes vont partir toutes les 5 secondes. Et les sas sont censés, sur le bon vouloir des athlètes, regrouper les nageurs par niveau. Un groupe pour les temps inférieurs à 1h, puis un de 1h à 1h10, etc… Je prévois d´aller danss le premier sas, vers l´avant sans me mettre en 1ere ligne puisque je n´ai pas de combinaison.
Pourquoi pas de combi ? Pas envie de transporter ma combi vintage depuis le Brésil. J´étais aux aguets pour en acheter une nouvelle, mais les prix suisses sont dissuasifs ! J´ai par ailleurs une opportunité qui se dessine pour plus tard. Et enfin, raison principale, je me suis équipé d´un skinsuit (vilain orange) – une combinaison non flottante (à l´instar de celles en néoprène) que je veux tester avant Kona. Car à Kona, tout le monde sera comme moi – sans néoprène car l´eau est trop chaude !

Je pourrais courir sous les couleurs de l´ACBB avec ce beau orange!

On observe les derniers préparatifs des volontaires, le drone, les pros. Une femme enfile sa combi en écoutant attentivement son coach. Bonnet rouge, ce doit être les pros je dis à Guerlain.
Je retourne courir un peu, puis je vais dans le 1er sas (sub 60 mn). Je cherche Eric du regard. C´est un copain brésilien, de Curitiba. Il doit prendre mes pieds pour partir sur de bonnes bases. Mais je n´arrive pas à le retrouver dans la foule de pingouins néoprènes. A contrario, je suis bien visible en orange.
C´est parti pour les pros, qui d´ailleurs ne sont pas avec les bonnets rouges. Rouge, ce doit être une autre catégorie – les AWA (les meilleurs ou les plus réguliers à l´Ironman).
Pro homme à 6h40, pro femme 6h42, et nous, à 6h45. Un départ toutes les 5 secondes. C´est plutôt pas mal. Le peloton aquatique est étiré d´entrée de jeu, on évite l´effet carpe (quand on jette à manger aux carpes dans un lac) ou machine à laver. De quoi rendre plus serein les plus hydrophobes.

Où est Charlie? A gauche, en orange et vert fluo.

Je suis dans la 8ième ou 9ième rangée, qui avance pas à pas, à chaque BIP fort (4 petits bips de compte à rebours + 1 fort de départ). Complètement à droite, afin de faire l´extérieur, car la première bouée est un virage à gauche.
Le départ par vague permet d´étaler la meute.

C´est parti ! Quelques foulées, je plonge et rattrape rapidement les quelques femmes parties devant. Je m´écarte donc davantage à droite. Inutile de jouer la mêlée maintenant. L´eau est bonne, plate, et transparente. 
Un départ en mode un peu soutenu, sans me mettre hors d´haleine. En fait, j´aurai dû me positionner quelques rangées plus tôt : je double en masse. Le contingent à gauche est assez compact avec 4 ou 5 files de nageurs, à la queue-leu-leu. C´est la trans-juracienne ! Après 100 ou 200m, il reste 3 ou 4 files à ma gauche, ça s´amincit.
Au moment de virer à la 1ere bouée, après 300 ou 400m, je reviens à la corde. Je me faufile sans mal, ce n´est pas hyper compact. Maintenant, je passe en mode de croisière. Je double encore un peu.
Ce qui est super, c´est d´avoir quelques nageurs, en ligne de mire : ca me donne une cible à rattraper progressivement et me permet de naviguer de manière économe. Je fais 10 à 15 coups de bras avant de regarder à nouveau. Respiration 3 temps, tranquille.

Nouveau virage, à droite cette fois-ci, sans avoir à jouer des coudes. Soleil pile en face : on voit que dalle ! Impossible de voir la bouée suivante. J´utilise les éclaboussures des nageurs devant. Il semble que je remonte tout doucement, on arrive au point de stabilisation : tu es avec les gars ou les filles de ton niveau.
Je monte d´un cran : je me concentre pour nager davantage sur les bras, en cadence. Je passe à l´alternance 3 temps / 2 temps. Et sens que sans le néoprène, la trainée des jambes est plus lourde. Ce sera pareil pour tout le monde à Kona. Je rattrape ce petit groupe.


Il y en a encore un à une quinzaine de mètres. C´est bien visible une fois que je tourne une nouvelle fois, à droite ici. On entame la longue ligne droite (des Hunaudieres). Approximativement 2km tout droit, sans virage, sans iPod, sans Whatsapp, ni Snapchat…
Du coup, je jauge si je vais chercher le petit groupe ou pas. Au final, j´ai un peu temps devant moi, autant s´occuper : je pars en chasse. Et puis si je pourrai prendre les pieds ensuite, ce sera toujours ça d´économiser pour la suite.
Le groupe s´est scindé en 2 files. A l´intérieur, il me semble qu´ils partent trop à droite. Je vise la file de gauche, mieux alignée avec les bouées longeant ce long tronçon.
Encore un peu de travail sur la technique, la respiration et je gratte peu à peu du terrain (aquatique). Ils ne sont 2 ou 3. Je reviens tranquillement, et me cale dans les pieds.
Sauf que c´est VRAIMENT tranquille. La file de droite – un seul homme en fait – semble aller un poil plus vite. Allez, on ne va pas philosopher sur le sujet, je me décale sur la droite, et commence à doubler. Je crée une troisième file : j´espère recroiser la route du solitaire de droite dans une centaine de mètres, et m´en aller avec lui.
Je double doucement le groupe de gauche, ça se passe bien. Mais le solitaire ne va pas plus vite, je le dépasse – à distance. Il est à 5 ou 10m sur la droite. Bon, ce n´est pas grave – il n´y plus de pieds à prendre, je me fais à l´idée de faire le job tout seul.
Je reprends mon rythme, avec une navigation tranquille (pas de courant, bouées maintenant bien visibles). Je dois encore avoir une quinzaine de minutes avant le prochain virage. J´espère pouvoir décrocher le petit groupe, qui s´est précipité dans MES pieds, à l´usure. Mais rien n´est moins sûr, et ce n´est pas grave – personne ne me touche, ce n´est pas gênant.
5 ou 10mn plus tard, je regarde derrière, j´ai l´impression d´avoir fait un petit trou, je remets la pression pour m´en séparer pour de bon.
Mais 5mn plus loin, j´ai toujours un gugus dans les pieds. Je reprends mon rythme. On verra au prochain virage, si je peux m´échapper.
Le temps passe assez vite – je ne souffre pas particulièrement. Juste un peu les bras, mais pas les abdos (typique quand je suis proche du seuil). 


Voilà ENFIN la bouée de virage, je vois quelques nageurs au loin, des pros (cf. la couleur du bonnet). J´ai commencé à en doubler sur la fin de la ligne droite. Ça occupe un peu.
Je remets un peu de rythme, dès fois que je puisse décrocher le wagon qui suit toujours… Je passe rapidement la bouée et remets une petite louche à la reprise. Ca commence à sentir la fin, ce n´est pas plus mal.
Re-virage, re-accelération. Je regarde derriere. Il est seul, mais toujours dans mes pieds. C´est la vie.
Maintenant, je commence le repérage d´arrivée. Pour la sortie de l´eau. Après la prochaine bouée, ce sera virage à gauche, et direction l´ile pour la sortie. J´ai l´impression que c´est un peu confus devant moi.
Effectivement, dès que je tourne, je constate qu´une partie des pros est pas mal à droite alors qu´il me semble que l´arrivée est en face, plus à gauche de leur trajectoire. Je prends mon temps pour bien vérifier où aller, je repère bien l´arche de sortie : ils sont bien en dérive. Je pars au plus court.
Je veux remettre un peu de jambes, mais
1. Je me rends compte que je les utilise dèjà pas mal, sans la portée du néoprène
2. J´ai les jambes (déjà) assez lourdes.
Donc, on reste comme cela.
Je passe donc à distance quelques pros supplémentaires, femme je suppose. Et j´arrive à la sortie de l´eau.
L´eau est tellement claire que je n´ai plus besoin de relever la tête, je me dirige vers les pieds des volontaires qui sont là pour nous aider à nous relever.
Les mains commencent à toucher le fond, la rampe de mise à l´eau. C`est le moment d´attaquer le tronçon terrestre.

Les choses sérieuses commencent maintenant.

La remise à la verticale n´est pas dramatique, pas d´étourdissement, pas de palpitation. Je prends mon trot pour rejoindre la zone de transition. Lunettes sur le front. Je regarde le chrono en passant sur le tapis de chronomètrage : 55 mn. Pas terrible. C´est ce qu´il se passe quand on ne nage pas pendant un mois je suppose.
(en fait, il y avait 3950m, soit 150m de bonus. Cela correspond à un 53mn. Un temps correct compte-tenu de la faible préparation).

Transition facile avec le skinsuit.

Ce n´est pas grave. Je file vers les racks de sacs, en ouvrant le haut de la Skinsuit. 541, 541, c´est mon numéro. Je tente de faire attention, car hier, en repérant, je m´étais trompé : 451… Un peu de dyslexie…
Je prends mon sac, et file sous la tente. Je le vide. Un athlète vient s´installer JUSTE à coté de moi, alors que la tente est quasi vide. En fait, c´est le gars qui était dans les pieds : Thank you, thank you ! Il me remercie – c´est vrai que c´était le bon plan pour lui. J´ai fait la navigation et la trace. Il a dû faire un bon chrono car il est VRAIMENT content.
Je mets le casque et la ceinture de dossard. La combi, les lunettes et le bonnet, dans le sac. Et hop, c´est reparti.
Je pars dans la travée, entre les racks C et D. Mon vélo (enfin, celui d´Alain à qui je l´ai emprunté) m´attend au bout de l´allée. Quand j´y arrive, impossible de trouver le vélo. J´ai dû me tromper. Stress. Je file dans la travée précédente. Je cherche, pas là non plus.
Je vérifie les numéros. Non, ce n´est pas les bons.
Je regarde de nouveau là où j´avais commencé mes recherches, ah ! Il est là le vélo jaune ! Je refais le tour, prends ma monture, et et cours vers la sortie du parc à vélo.
J´avais oublié des élastiques pour maintenir mes chaussures clipées en place. Et le plan B, c´était du fil de couture. Mais en trottinant, un coté casse : la chaussure tourne furieusement sur la pédale : je surveille que je ne la perde pas. J´ai déjà perdu assez de temps pour trouver le vélo.

Guerlain est derrière les barrières et filme semble-t-il. Coucou !

Coucou Guerlain!

Je passe la ligne, je peux monter en selle. Quelques coups de pédales pour prendre de la vitesse, et commence à enfiler les chaussures. Pas hyper simple, je n´ai pas beaucoup l´habitude de ce vélo – plus petit, plus vif que le bien. Pour couronner le tout, la route est un peu bosselée. Bref, je mets un peu de temps à me caler. Rien de grave.

En avant pour 180 km!

Pas de surprise, les jambes sont un peu lourdes, il va falloir quelques km (15 à 20 d´habitude) pour se sentir bien à nouveau.
Le parcours est composé de 2 boucles identiques, a priori avec 3 bosses. 2 sont de l´autre coté du lac, quand on va monter sur le plateau. Et la 3ieme est juste à la fin de la boucle, proche de là où on loge. On l´a testée avec Arnaud, un bon raidillon. Il devrait bien faire mal au second tour, au km 175 !
Je me cale en position aéro, et commence à boire. Alors que je passe proche du centre ville et commence à longer le lac, dans la longueur, je constate que :
1. C´est SUPER beau. L´eau est belle – je vois même encore quelques triathlètes qui nagent au loin. Les montagnes derrière.
2. Il y a un léger vent contraire. Cela renforce la nécessité de rester en position aéro. Et je me dis que l´on aura le vent dans le dos au retour.
Le vent met du stress dans les jambes. Autrement dit, je commence à peine de rouler et j´ai déjà mal aux pattes. Je prends mon mal en patience – c´est vraiment l´expression appropriée ici !
Quelques avions (cyclistes) passent, je ne peux absolument rien faire. J´ai les cuisses lourdes, et les fessiers qui chauffent. Aie, aie, c´est pas gagné cette histoire !

Pour m´occuper un peu, je surveille les dossards, pour repérer les vieux de ma catégorie, juste pour m´occuper puisqu´aujourd´hui, c´est juste pour le finir. Quelques gars sont déjà passés. Puis je repère un espagnol, qui m´énerve un peu. Non, qui m´énerve totalement. Au moment où il me double, il repère que nous sommes dans la même catégorie, et me nargue en double : « Bye bye » me dit-il !
Il me met dans le rouge (dans la tête). Il vient d´incarner toute la bétise anti-sportive. On est là certes pour faire la course, mais dénigrer, narguer un autre concurrent… Pourquoi ? Qu´est-ce que cela peut bien lui apporter ?
Bon, je me dis que je le rattraperai peut-être sur le marathon (ça me ferait plaisir), mais il ne faut pas que je me raconte d´histoire ! Jamais de la vie, vu l´état de mes jambes, je ne pourrai le rattraper en course à pieds. Kona alors. Il vient de passer sur ma liste « à battre » pour Kona !
Bon, elle n´est pas bien longue cette liste. Il y a juste le russe qui m´a tapé – à la régulière – à Floripa. Et autant, je serai content de retrouver le russe, car très fair-play, autant ce ne sera pas le cas de cet âne espagnol.
D´autant plus que l´espagnol s´est maintenant calé dans la roue d´un autre gars. Un drafteur de première catégorie de surcroit… Il m´énerve !! Grrrrr !!
Je passe à autre chose, je ne vais pas gâcher ma course pour lui.

Ce serait dommage de ne pas profiter du paysage!

Je commence à manger, prends des gourdes (eau & boisson énergétique) au ravito. Je ne décolle pas du 30km/h. C´est triste… Mais j´en profite pour regarder le paysage. A droite, le lac et les montagnes. A gauche, la colline, avec des vignes, un petit château, … Pas mal.
Un arbitre… UN ARBITRE, hé hé, hé. Je lui fais signe que devant, ça drafte. D´habitude, je fais mon truc, mais là, je n´ai pas pu m´empêcher. Et j´espère vraiment qu´il prenne un carton.


Enfin ! On vire enfin à gauche, on va commencer à monter un peu. Je m´en réjouis car je suis clairement limité en puissance sur le plat, j`espère que l´inclinaison de la route me permettra de reprendre du poil de la bête. On a déjà fait 30km,
Avec quelques montées et des enchainements de virage, j´arrive finalement à accrocher une paires de gars. Cela remet du baume au cœur, même si je dois m´employer pour rester à une dizaine de mètres – distance réglementaire, pas comme l´espagnol.
On commence une belle montée, mes compagnons « prennent » leur temps, ou gère l´effort. Je passe donc. C´est une bonne nouvelle, au moins dans la tête, car les jambes font toujours mal. Donc, péniblement, je passe. Ils me reprendront certainement un peu plus loin, sur le plat.
Mais avant cela, c´est à mon tour de faire reprendre. 2 vélos passent, il faut que j´accroche. Je monte d´un cran l´effort et me rend compte que je viens de me doubler par une femme, non pro ! Raison de plus pour m´accrocher.
Sur le plat, c´est difficile. En montée, un peu moins.


La première difficulté passée (enchainement de montées), je réalise qu´il me manque certainement un cran coté pignon (car mes jambes ne sont pas au rendez-vous) et que j´aurai certainement dû reconnaitre CETTE partie du parcours plutôt que le radillon de quelques km proche de la chambre !
Je commence à m´inquiéter sur la seconde bosse, après que celle-ci ait déjà bien taxé les jambes. Que va-t-il me rester ?
En attendant, je m´accroche à distance dans un paysage superbe. Avec la hauteur, le lac et les montagnes gagnent encore en plénitude. On passe dans de petits villages suisses, des champs, l´herbe fauchée. Bref, j´attends au détour d´un virage de croiser la vache Milka !
C´est superbe.


En attendant, les jambes dérouillent. On se fait doubler de temps en temps par des cyclistes bien solides. Dans les descentes, je prends mon temps car la dame, Verena – c´est son prénom – est moins à l´aise. Je ne veux pas me rapprocher de trop, cf. drafting, et les arbitres passent régulièrement. Et surtout je n´ai pas la caisse pour prendre les devants.
Nous rejoignons une belle montée sinueuse, au milieu de vignes. Tout le monde prend son mal en patience pour monter. Les rouleurs, avec les disques pleins, restent sur la plaque (grand plateau) et sont en danseuse, un coup de pédale à la fois. Verena et moi, en rythme, scotchés à la selle, on mouline. Et tout doucement, on reprend du monde. Cela nous permet même d´échanger quelques mots, car je dois la doubler. J´aimerai mettre une vitesse plus facile, mais je suis déjà au max, et pour minimiser l´impact, je reste en cadence, et double donc.
Elle parle un français excellent. Elle est allemande et habite en France. Et moi français qui habite au Brésil… Et j´en bave.

Dans cette montée abritée, on sent bien le soleil et la chaleur. Ca commence à bien transpirer ! Je bois pas mal, même si je dois limiter la boisson énergétique. Trop concentrée ou ventre trop sensible, je commence à avoir le ventre barbouillé. Je n´ai pas besoin de calorie qui y sont car j´ai suffisamment de barres et les ravitos sont complets (PowerBar ou banane).
Le challenge supplémentaire arrive avec la fin de la seconde bosse. Dans le sens où la fin n´arrive pas ! Après la partie raide et sinueuse, on enchaine par un long faux plat. Mais vraiment faux ! Bref, c´est maintenant, une longue montée, avec le vent de face ou de ¾ qui se fait sentir. Et le train, à droite, qui nous double. En même temps, Verena me repasse.
D´un coté, j´ai « envie » de broyer du noir parce c´est dur, ça fait 45km et mes jambes ne sont toujours pas « déliées ». Le vent de face, ca roule lentement, je suis à 2 doigts de me demander ce que je fous là ! Mais de l´autre, le spectacle est vraiment superbe, je dois prendre cette « sortie » comme un entrainement difficile, j´ai 10 semaines avant Kona et les championnats du monde.

Heureusement, malgré les jambes qui hurlent de douleur maintenant, j´arrive à rester positif et profite de cette belle sortie.
Les jambes font mal certes, mais je n´ai l´impression de taper dedans, coté cardio. Par contre, une fois de plus, mon capteur cardiaque ne fonctionne pas ! Après Florianopolis où la pile m´avait lâché le jour de l´épreuve, c´est le capteur qui a rendu l´âme récemment. Et aujourd´hui, bis repétita avec le nouveau. Je tente de bidouiller, mais en vain. Au feeling.
On redescend vers le lac, ENFIN ! Ce sont de superbes descentes, où j´arrête de pédaler ou que très légèrement. Inutile de passer devant Verena. Au contraire, je tente de me refaire une santé car après 60 ou 65 km, quand nous revenons sur le plat, le long du lac, je ne peux que constater que les jambes sont bien cramées. J´hésite à lever le pied et la laisser filer. 

Non, allons-y. On serre les dents. C´est musculaire, et pas vraiment cardio (sauf dans les cotes peut-être).
Du coup, quand je vois qu´elle a coup de mou, je prends le relais. Mais ça ne dure pas plus de 5mn avant qu´elle ne repasse, plus fraiche qu´avant.
Le retour en ville est dur, car je sens un peu le vent dans le dos – on roule (enfin !) à bonne allure, mais j´ai vraiment du mal à rester au contact à 10m. Il ne faut pas que je saute maintenant, sans quoi je vais être misérable pendant tout le second tour.
On croise quelques pros, mais je n´arrive pas à reconnaitre qui.
On se fait parfois doubler par des uber bikers, qui avaient pris pas mal de retard en natation. Ils sont beaucoup plus fringuant maintenant.

On passe en ville, il y a du monde, cela distrait des signaux qu´envoient les jambes depuis plus de 2hr.
Je passe devant la zone de transition, j´y aperçois Eric, Thuy et Guerlain. La famille d´Arnaud aussi, je crois. Et on file vers le fameux dernier « mur » de la boucle. Il reste 10 ou 12 km.
Ce va être un virage sec à droite, le début de la montée et la pente forte en lacet sur 1 à 2 km.

1er tour - je confirme, j´en bave.

Nous y voilà, comme dans toutes les montées, cela regroupe les athlètes. Verena et moi remontons, tranquillement. Obligé de sortir de la selle par moment, je me rassois dès que je peux pour rester au train, et ne pas trop puiser. Petit faux plat, et la pente augmente à nouveau en tournant. Et là, c´est comme à Roth ou à Frankfurt ! La cote s´appelle Heartbreak hill (casse-cœur)… Ce n´est pas pour rien. Mais ce n´est pas difficile que c´est NOIR de monde. On ne peut passer qu´un à la fois, pas possible de doubler. Je dois donc patienter. Les jambes tiennent, voire réagissent plutôt bien. Mais je m´interroge sur l´état dans lequel je serai dans 90km – on est au km85.
Ravito, descente, retour vers la zone de transition, et on repart pour le second tour. Coucou aux supporters, même si au fond de moi, je suis dans le dur.

Hop, hop!

L´objectif est maintenant simple, ne pas décrocher de Verena. Elle fait le train, vent de face. Elle est impressionnante. D´ailleurs, je ne dois pas être le seul à penser cela, parce que les quelques gars qui nous rattrapent maintenant viennent s´intercaler. Je dois être méga vigilent car du coup, je glisse 2 ou 3 places derrière, et si l´un des gars sautent, ce sera TRES difficile pour rentrer sur Verena.
Tant bien que mal, je m´accroche – double pour combler les trous et rester dans le bon wagon. Ces 30km de plat, le long du lac, paraissent interminables, en position aéro. Même si c´est dur dans les côtes, j´y suis plus à l´aide que les copains. Il me tarde d´y retourner d´autant que le vent s´est renforcé. Et puis j´ai déjà vu le paysage !
C´est donc avec soulagement que je tourne vers la colline avec notre petit groupe. Mais, la pente fait monter encore d´un cran l´inconfort permanent dans les jambes.
Le réconfort arrive quand je me redresse, dans les montées. Je n´ai pas mal au dos mais la tension dans les jambes est moindre. Et en montant, mes acolytes sont en difficulté. Je me retrouve cote à cote avec Verena, on papote un peu.
Elle est apparemment en tête de son groupe d´age, avec un objectif bien clair en tête : Kona. Je comprends mieux !!
Le rythme reste soutenu mais j´en bave moins, je suis presque au train. Les paysages sont toujours superbes, même au second tour.
Je m´assure de bien m´alimenter, et bien boire. Et cela se passe bien.
On revient sur les lacets dans les vignes – le second tour passe plus vite. Je suis encore obligé de forcer plus que souhaité faute de vitesse plus facile, mais c´est la chaleur qui me surprend : on sent la chaleur remonter du bitume… Heureusement, dès que l´allure remonte, on ne sent plus cet effet.
On continue notre chemin, dans la longue ligne droite montante, le long du chemin de fer, on reprend quelques gros rouleurs – avec le disque à l´arrière. Il y un rital, et un allemand je crois. Ils nous repasseront sans doute.
Après quelques villages, quelques vaches, quelques bosses, quelques ravitos, on redescend vers le lac – ENFIN ! Même si je suis mieux qu´au premier tour (proche du calvaire !), j´en ai déjà plein les pattes…
Dans la descente, Verena sécurise les courbes. Je pourrais passer mais à quoi bon ? Je laisse filer et profite pour m´étirer entre autres.
Retour sur le plat, Verena ne lache rien. Allez, on ne va pas être chiche. Je prends quelques courts relais. Je voudrais faire davantage, mais quand on n´a pas les jambes…

Passage devant la zone de transition, j´aperçois Guerlain & Eric. J
Derniere difficulté à franchir, heartbreak hill, de nouveau. Rien que la ligne droite pour y arriver est dure – il va être temps de descendre du vélo ! On vire à droite. 

C´est la photo du 1er tour (bcp de monde): le lac derrière, Verena devant.

Je dois rapidement sortir de la selle, en danseuse. Il y a beaucoup moins de monde maintenant. Mais à nouveau, on double. Un peu, car les cyclistes sont maintenant bien étirés sur le parcours.
Un gars vient courir à coté de Verena, « tu es toujours en tête avec xx minutes d´avance ». Son coach apparemment. Je n´ai pas entendu quelle marge elle a à ce stade. J´espère qu´elle sait courir, aussi bien qu´elle ne pédale !
Un peu dans le rouge, je passe la dernière montée. Dernier ravito – je ne prends rien.
Dans la descente, plus technique, je passe Verena – elle me reprendra certainement dans les derniers km de plat.
Retour sur le plat, les jambes brulent pour dire quelque chose comme « Y en a marre ! ». J´augmente la cadence, pour préparer la transition. Je vais devoir faire une petite pause technique, la vessie est pleine. Autant la faire en T2, cela ne sera pas dans le chrono du marathon.

Je freine, et descends enfin de ma monture, enfin, celle d´Alain. Verena ne m´a pas rattrapé.
OUCH, je tente de courir à coté du vélo, mais ce sont 2 poteaux que j´ai à la place des cuisses – totalement raides ! J´espère que personne n´enregistre cela, car ce ne doit pas être joli-joli…
Je file tant bien que mal dans le parc à vélo, dépose mon compagnon mécanique, et repars au trot vers la tente – pause pipi au passage. Interminable bien sûr.

Je vide le sac, y loge le casque. Enfile le combo chaussette – manchon. Prends lunettes et casque, et en route en donnant le sac au volontaire.
Je sors du parc en mettant la casquette. J´entends du monde – Guerlain je crois. Jusque-là, tout va bien, ha ha ha.

Jusque là, tout va bien.

Le plan est simple, 10km tranquille, 10 soutenu, 10 tranquille et on lâche ce qui restera pour finir. 4 boucles, principalement en ville, ou le long du lac. Il fait beau et chaud, mais rien d´insupportable.

Je pars donc tranquille, les jambons sont un peu moins raides, il va falloir donner un peu de temps pour relâcher tout cela. Manque de bol, on prend une rampe, un pont d´entrée de jeu.
Aie aie aie !
J´ai les ischios qui se raidissent de suite, limite de la crampe. Je grippe tout doucement, avec les jambes raides (presque sans plier les genous). C´est horrible, inconfortable et douloureux ! C´est pas gagné notre histoire !

Ouf, c´est suivi d´un peu de plat… sur des pavés ! Non ! Je n´arrive pas à amortir, chaque pas me fait souffrir. Je ralentis pour passer en mode pas de bébé (baby steps).
Retour sur du béton – ça va mieux.
Mais on enchaine avec une descente maintenant, le calvaire de nouveau ! Les cuisses sont bien raides aussi, mais c´est moins grave que les ischios – c´est sans comparaison.

Ca pique!

J´ai quelques autres mauvaises surprises de la sorte dans les premiers kilomètres. Un enfer. J´utilise même la rambarde ou les barrières pour m´aider à monter avec les bras. J´en suis à 2 km maxi, il en reste 40 ! Mon horizon semble s´obscurcir quand je pense à cela…


Finalement, retour sur le trottoir qui longe le parcours vélo, avec un peu d´ombre. Je sens que les jambes commencent à se délier. Ouf. Rarement fait une transition aussi douloureuse…
Le rythme de croisière s´installe, je peux commencer à regarder le chrono. Autour de 5mn/km. C´est très bien. Et c´est assez agréable. Sauf pour le tunnel pour rejoindre le parc le long du lac : encore une rampe, douloureuse. On passe sur du gravier / terre battue, toujours à l´ombre. Tout va bien, il y a beaucoup de spectateurs qui encouragent. Ça fait du bien.
Au ravito, je bois 2 verres systématiquement et prends du gel une fois sur 2.
Re-tunnel, re-rampe douloureuse. On part vers le centre ville historique. Le parcours est varié, c´est sympa. Il y a des éponges aux ravitos, j´en prends 2 pour rester frais. Il doit faire proche de 30 deg. Mais à cette allure / cet effort, cela ne pose pas de problème.

Tiens, tiens, regardez qui je rattrape. Je reconnais le haut (maillot) de l´athlète que j´avais vu avec son coach, avant le départ, avec Guerlain. Mort de rire, c´est Verena ! Ça, alors ! Elle a dû me passer dans la transition, pendant que je faisais la pause technique et enlever sa veste de cyclisme. On parle un peu. Elle est toujours en tête, fixée sur son objectif. Je l´encourage. Elle reste calée sur son allure. De toute facon, je me doute bien qu´elle de revenir sur moi au 3ieme tour, tour où j´ai le « droit » de lever le pieds selon les instructions de mon entraineur.

Il faut assurer le refroidissement.

Les pavés du centre-ville ne font plus mal, pas comme ceux à la sortie du parc. C´est un peu en descente, j´en profite.
Puis, après une autre rampe pour retourner au lac, c´est un long aller-retour sur des dalles en béton. Toujours beaucoup de monde. Je suis à l´aise. Et suis plutôt content, vu le vélo douloureux que je viens de faire, en 5h37. C´est mon pire chrono de vélo Ironman…

Je sens néanmoins que je n´ai pas beaucoup de marge pour accélérer. Les rampes me l´ont rappelé…
Mais comme je suis en train de boucler le premier tour, ce sont 2 ou 3 km de plat, bien plat ! Avec encore beaucoup d´ombre. Le radiateur, dans ces conditions, fonctionne bien. Je tourne en 5 :10 à 5 :15/km. 

Ca tient, pour l´instant.

Je passe aux 10km en 50:30. C´est super. Ca déroule bien. Je ne suis pas enthousiaste de revoir l´enchainement de rampes, mais les jambes sont moins engorgées maintenant. Le vrai challenge, c´est de monter l´intensité d´un cran. Comme demandé par Gui, mon coach. Il faut le prendre comme une séance d´entrainement : il faut s´y coller rigoureusement.

Je repars, et affronte doucement les rampes qui restent douloureuses, inconfortables et tout et tout. Puis, sur le plat, je mets le couvert. L´écart / le changement de rythme n´est pas énorme, mais progressivement l´allure revient vers 5 :00. J´encourage les gars que je passe. Ça donne du baume au cœur.

Par contre, je sens que la température monte aussi, rapidement. Je bois davantage aux ravitos, et augmente l´arrosage avec les éponges.
Puis ce sont les jambes qui donnent un préavis de grève : ça commence à faire beaucoup, elles se durcissent.
Compte tenu de l´absence totale de dialogue sociale, les jambes se mettent en grève : les cuisses redeviennent des poteaux, comme à la descente du vélo. Des poteaux, ou des piquets de grève !
J´ai fait 3km soutenus. Le mouvement social se propage : c´est monté à la tête !
Qu´est-ce que je fous là ? Je n´arrive plus à lever les genoux. Je n´arrive plus à refroidir – je passe en mode déshydratation. Je m´essouffle. Je serre les dents.

Au taquet!

Mais aujourd´hui, c´est pour le fun… Pas d´enjeux. Je me résous à être « raisonnable ». Les mollets et même les chevilles me font mal : je ne veux pas risquer la blessure. Sur cette belle excuse – je ne suis pas dupe – je me mets à marcher. C´est toujours amusant de voir le cheminement dans ces situations, la rationalisation se fait toute seule, et forcément, marcher est une excellente solution quand tout le corps souffre. Tout cela en 500m, 1km max, en quelques minutes. Je suis cramé !

Au-delà de la honte, car c´est quand même la loose de marcher, surtout quand tu t´entraines depuis 1 an pour te qualifier pour Hawaii, et que tu dois marcher pour préparer les championnats du monde. Bref, en mode « je broie du noir ». Le processus doit être similaire à post trauma (refus / rage / acceptance / dépression, ou je ne sais quoi).
Je broie du noir dans la tête, mais le corps n´est pas mieux. Je ne suis pas bien, avec des étourdissements. Je pense qu´effectivement, je suis proche de la déshydratation ! Je m´arrête au ravito suivant : je passe aux sucres rapides : Coca. D´ailleurs, ce n´est pas Coca, c´est Pepsi me disent les volontaires ! Et quelques mètres plus loin, je prends du bouillon : besoin de sodium, du sel, du sel !!
J´ai pourtant pris du sel de manière régulière sur le vélo. Mais pas de façon suffisante apparemment.

Cramé! Dans le dur.

Je reprends la marche, pour rallier le prochain ravito. 2 km. Une vraie traversée du désert, malgré les spectateurs qui ne sont pas avares en encouragement. Je suis seul dans mon calvaire. Je dois me refaire une santé.


La douleur musculaire diminue, je suis encore fébrile quand j´arrive à reprendre encore du Coca, heu,, Pepsi. Et du bouillon, et de l´eau. De l´orange aussi. Je suis de retour en ville, en pleine déroute physique. Mais la chaudière est rallumée, l´énergie commence à revenir. Ouf.
Km17. Je commence à frissonner. Il faut que je prenne du rythme, et arrête de m´asperger. Je recommence à regarder le chrono, relève la tête, et me focalise davantage sur les spectateurs.
Je tourne à 10mn/km. La vache ! Il me reste 25km, à 10mn le km, 250mn. Ca fait – et j´arrive à faire le calcul mental – 4hr de marche ! Ouch, c´est long. J´ai déjà nagé 1hr, pédalé 5h40, ai couru / marché d´1h30 et il me reste 4hr si je reste à ce rythme. Aie aie aie. Je dois reprendre du rythme, tout en marchant – incapable de courir de toute façon.
J´accélère le pas, regagne en lucidité, et sors du coté sombre (Dark side) de la Force… Ouf, ça va mieux.


Je suis content de retrouver un peu du poil de la bête,. Verena repasse en me proposant de la suivre – je fais 10m avec elle. L´italien me rattrape aussi. Il faut avaler sa fierté et se focaliser sur la tâche.
J´arrive à revenir à 8 ou 9mn par km. C´est moins mal.
Les gens ont au moins le temps de lire mon prénom sur le dossard – être lent a ses avantages !
C´est lent mais ça passe, presque vite.
Je trouve Eric vers le km 19. Je m´arrête pour expliquer : Je me suis grillé, je vais marcher, on verra après. Abandonner n´est pas à l´ordre du jour. Ca fait du bien d´échanger un peu.
Je continue. La fin du second tour est difficile. Les spectateurs sont nombreux, et très pushy – Allez, recours ! Allez, cours !
Non, patience. 


Encore 21 km à faire. 


Je commence à me dire que je peux bientôt recommencer à trottiner. Mais je me fixe un plan simple – je termine ce 3ième tour en marchant – j´assume – et vais courrir le dernier tour – tout le tour.
Le challenge est accepté ! J´attaque ce tour déterminé, allure de marche soutenu – j´échange parfois quelques mots avec les athlètes qui me doublent. Ou avec ceux qui marchent plus doucement (comme moi il y a un tour). Je repère les français, de Poissy, de Bretagne, Reims, ou je ne sais quel club. « Allez Machin… ». J´arrive presque à passer sous les 7mn au km. Je marche presque (même pas en rêve) comme notre champion du monde de marche, Yohann Diniz.

Au km 23, je trouve Guerlain et Eric à nouveau. Je pose pour la photo. L´humeur est bonne. 

Elle n´est pas belle la vie?

Avant de repartir au centre-ville, je descends une rampe. J´aperçois la famille d´Arnaud. Je ne l´ai pas encore croisé. J´espère que ça va. Ils se retrouvent coincés par les barrières, tentent de trouver un chemin, mais se font rattraper par la patrouille – qui leur ordonne de retourner dans la zone pour la public. Ca rigole pas en Suisse. Je n´arrive pas à les appeler, pour faire coucou.

Au 3ieme tour, on a tous nos petites habitudes. Tu reconnais certains volontaires. Tu recharges ton éponge à la fontaine. Tu redoubles l´italien pour la 12ieme fois semble-t-il – partie de yoyo… J´en arrive à me dire qu´il est temps de recourir.
Je m´astreints à attendre la fin du 3ieme tour, pour faire un bon 4ieme tour (sans marcher). Cela semble rationnel et un bon plan.
Encore quelques kilomètres de marche, à bonne allure, et dans la bonne humeur.
Cela passe vite, et je me retrouve vite proche de l´arrivée, à 1 tour de la conclusion de cet Ironman.


Je recommence à courir. Autant, je croyais être frais (plus frais en tout cas), autant c´est encore bien engourdi au niveau des jambes. Les premières foulées sont lourdes, et peu aisées.
Mais reprendre devant un parterre de spectateurs aide à minimiser cela.
Les rampes restent douloureuses. Plus d´espoir d´amélioration à ce stade de la course.
Mais sur le plat, les sensations reviennent progressivement. Aux ravitos, je carbure au Coca, heu, Pepsi.
Et surtout, surtout, je recommence à reprendre du monde ! Bien sûr, il y a les bons, qui me doublent encore, mais à cette heure avancée (plus de 10h de course déjà), beaucoup d´entre eux ont déjà leur médaille autour du cou.
Effet lasso : je vise un gars, ou une fille, et tout doucement, je remonte. Puis je passe, et recommence avec quelqu´un d´autre. Rien de tel pour retrouver le moral. 

Apres le décrassage des premières km du dernier tour, je passe de 5:35 à proche de 5:00/km. J´ai l´impression d´aller super vite ! (tu m´étonnes, après 16km autour de 10mn au km !).
Quand je double doucement quelqu´un, j´encourage, et propose de courir ensemble. Le rouquin du moment le fait. On fait 500m ensemble, on papote. 

J´accélère, je commence à avoir le souffle un peu court. 1km, il craque. On s´encourage encore une fois, et je file, encore plus motivé.

La machine est relancée.

J´augmente le refroidissement à nouveau : j´utilise les éponges à nouveau. Je n´ai plus les douleurs aux articulations ou aux muscles qui m´avaient fait arrêter de courir au 2nd tour. Je continue à mettre le système en pression. Le passage en ville, au train, va super vite – je double pour une dernière fois l´italien, qui marche avec un de ses compatriotes. Il rigole quand il me voit.
Retour le long du lac, pour l´aller-retour. La famille d´Arnaud est là. Ils me disent qu´Arnaud dérouille aussi en course à pieds, mais il tient le coup.
Je double encore, et remets la pression, je passe sous les 5:00 au km. Et dans le panorama des athlètes, je suis un des plus rapides : ça m´encourage encore davantage.
Je pourrais finir au train, tranquille. Mais ce n´est pas le style de la maison, et Gui a dit de pousser le dernier tour. Autant bien le faire, surtout que ce n´est pas souvent que j´ai 11hr dans les jambes ! Pour une simulation, c´est une GROSSE simulation !

Ca tire, mais le corps tient le coup. Je respire fort, les muscles restent le facteur limitant mais rien à voir avec le début du marathon.
Je jette tout ce qu´il reste dans les derniers kilomètres, en pensant à la technique. Ca m´aidera pour plus tard.
Dernier km, à fond. Je viens de faire un 4:39, il faut que je continue. Ca brule ! 

Il est content quand même le garçon.

Je passe derrière le « village », il me reste l´épingle du finish. Ce fut dur, mais qu´est-ce que c´est bon! Même si le temps n´est pas (vraiment) pas terrible, c´est bon !
Ligne droite en relâche pour apprécier ce moment.

Un peu vanné, pour le moins, mais satisfait.
Il reste (restait) 12 semaines avant Kona : il y a du boulot devant moi !

L´entrainement pour Kona commence maintenant.